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samedi 19 mai 2018

Trump sommé par Kim de s'éloigner de Bolton


18 mai 2018

Trump sommé par Kim de s'éloigner de Bolton

La ligne dure du conseiller à la sécurité nationale, le faucon John Bolton, menace le dégel avec Pyongyang

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TRUMP RECONNAÎT UN REMBOURSEMENT À SON AVOCAT DANS L'AFFAIRE STORMY DANIELS
Donald Trump a remboursé jusqu'à 250 000 dollars de " frais " divers à son ancien avocat Michael Cohen, selon des documents officiels publiés, mercredi 16 mai, par le Bureau d'éthique gouvernementale américain. Ces remboursements, que le président des Etats-Unis aurait dû révéler dès l'an dernier selon le Bureau, pourraient avoir couvert les 130 000 dollars versés par M. Cohen à l'actrice pornographique Stormy Daniels, peu avant la présidentielle de 2016. Celle-ci dit avoir eu une liaison d'un soir avec M. Trump en 2006 et évoque un accord de confidentialité destiné à la faire taire. Le président américain a pris ses distances récemment avec M. Cohen, désormais dans le collimateur du FBI.
Les élus républicains, qui ont défendu auprès du comité norvégien l'attribution à Donald Trump du prochain prix Nobel de la paix pour sa gestion du dossier nord-coréen, sont-ils allés un peu trop vite en besogne ? Contraint de réagir, mercredi 16  mai, à une -menace d'annulation du sommet prévu avec Kim Jong-un, le 12  juin, à Singapour, le président américain a choisi pour sa part la prudence. " Rien ne nous a été notifié, nous n'avons rien entendu. (…) Nous verrons ce qui va se passer ", a-t-il précisé en marge de la visite du président ouzbek, Chavkat -Mirziyoyev, à la Maison Blanche. " Nous verrons ", a répété M.  Trump.
Un peu plus tôt dans la matinée, sa porte-parole, Sarah Sanders, avait indiqué avoir " toujours bon espoir que la réunion se tienne ". " Nous agissons dans ce sens, mais, en même temps, nous étions conscients du fait qu'il pouvait s'agir de négociations difficiles ", a-t-elle ajouté. " Comme le président l'a dit à plusieurs reprises, nous sommes prêts pour cette rencontre, et si elle se  produit c'est très bien, sinon nous aviserons ", a-t-elle conclu.
Douche glacéeMardi, le ministre adjoint des affaires étrangères de la Corée du Nord, Kim Kye-gwan, a en effet renoué avec la rhétorique offensive qui était propre au régime de Pyongyang jusqu'à la détente matérialisée par une rencontre de Kim Jong-un avec son homologue de Corée du Sud, Moon Jae-in, fin avril, et le projet de sommet sans précédent avec un président américain. " Si les Etats-Unis nous mettent au pied du mur et exigent unilatéralement que nous renoncions à l'arme nucléaire, nous n'aurons plus d'intérêt pour des discussions et nous ne pourrons que reconsidérer le sommet à venir ", a-t-il déclaré.
Survenant après une série de gestes de Pyongyang – de l'annonce du gel des essais balistiques et nucléaires à celle de la fermeture du site de Punggye-ri, en passant par la libération de trois ressortissants américains détenus en Corée du Nord –, la déclaration du diplomate nord-coréen a fait l'effet d'une douche glacée. Elle est intervenue après l'annulation d'une rencontre de haut niveau avec la Corée du Sud pour protester contre des manœuvres militaires annuelles entre Séoul et Washington.
De plus, Kim Kye-gwan  s'en est pris frontalement au conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump en place depuis un peu plus d'un mois, John Bolton. Ce dernier, un faucon nationaliste, avait jugé " parfaitement légitime " avant sa nomination, dans une tribune au  Wall Street Journal, que les Etats-Unis réagissent à la " menace imminente "posée, selon lui, par la Corée du Nord " en frappant en premier ". Il avait aussi eu une formule-choc au cours d'un entretien donné à la chaîne conservatrice Fox News,le 29  avril : " Nous pensons au  -modèle libyen de 2003-2004 ", avait-il déclaré à propos du dossier nord-coréen.
A l'époque, alarmé par l'invasion de l'Irak par les Etats-Unis et de peur d'être la prochaine cible de Washington, le dictateur Mouammar Kadhafi avait de lui-même renoncé à un embryon de programme nucléaire. Le règlement du contentieux de Lockerbie – l'explosion, imputée à des agents libyens, d'un avion de la Pan Am au-dessus de l'Ecosse, en  1988, causant la mort de 270 personnes – avait parachevé la normalisation de son pays – Kadhafi ayant même accepté de livrer deux suspects.
" Répugnance "Mais Kim Kye-gwan a gardé un autre souvenir de l'épisode libyen et il a vu dans la formule du conseiller à la sécurité nationale une tentation " extrêmement sinistre visant à imposer " à son pays " le destin de la Libye ou de l'Irak ". Mouammar Kadhafi avait été tué après un soulèvement appuyé militairement par les Etats-Unis ; son homologue irakien, Saddam Hussein, avait été condamné à mort et pendu après avoir été renversé.
Le 13  mai, au cours d'un autre entretien accordé à la chaîne ABC, John Bolton a campé de  nouveau sur une ligne dure. Il a ainsi affirmé que la dénucléarisation de la Corée du Nord, qui ne " sera pas facile à accomplir ", juge-t-il, devra intervenir avant que " les avantages ne commencent à arriver " pour Pyongyang. Mercredi matin, Sarah Sanders a pris ses distances avec cette querelle en récusant tout " modèle libyen ", préférant défendre un " modèle Trump ".
Mais le contentieux entre -Pyongyang et le conseiller de M.  Trump est ancien, comme l'a rappelé le diplomate nord-coréen : " Nous avons déjà mis en lumière la personnalité de Bolton par le passé, et nous ne cachons pas la répugnance qu'il nous inspire. " En  2003, alors membre de l'administration de George W. Bush, où il était chargé des questions de désarmement, ce dernier avait prononcé un discours incendiaire contre la Corée du Nord au cours d'un déplacement à Séoul. Pyongyang avait répliqué en le qualifiant, notamment, d'" ordure " et de " suceur de sang ".
Kim Kye-gwan a par ailleurs -sèchement repoussé la perspective d'aide économique que le secrétaire d'Etat américain, Mike Pompeo, a fait miroiter, le 13  mai, dans une allusion sans doute involontaire à l'accord nucléaire conclu par les Etats-Unis et cinq autres grandes puissances avec l'Iran, dont Washington vient de se retirer. M.  Pompeo s'est entretenu à deux reprises avec Kim Jong-un depuis le début de l'année, lors de voyages à Pyongyang. Il a été épargné, tout comme Donald Trump, des diatribes de Kim Kye-gwan.
En  2003, en dépit du soutien public dont il avait bénéficié de la part de George W. Bush, John Bolton avait été écarté des négociations entre Washington et Pyongyang visant déjà le nucléaire. Elles avaient alors débouché sur une impasse.
Gilles Paris

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